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Un camp oublié …

De 1874 jusqu'aux années 1920 un camp de manœuvre a été installé sur les communes de Montolieu, Alzonne, Aragon, Ventenac-Cabardès et Moussoulens.

Il fut appelé « camp d'Alzonne », mais la plus grande surface était sur Moussoulens. Aussi, le Conseil Municipal a réclamé plusieurs fois pour qu'on le nomme « camp de Moussoulens ».

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Après la défaite de 1870 face à la coalition d’états allemands dirigée par la Prusse, le gouvernement français voulait recréer une armée digne de ce nom capable de défendre la patrie mais également de prendre sa revanche et de reconquérir l'Alsace et la Lorraine.

Dans cet esprit, le service militaire obligatoire est décrété et la formation des soldats demandent l'organisation de manœuvres. Des projets de camps sont imaginés.

Le 1er octobre 1872 le Conseil Municipal de Moussoulens est réuni pour étudier une demande présentée par le commandant du Génie pour l'installation d'un camp sur le plateau de la Bitarelle.

Le Conseil décide de répondre favorablement à cette demande « qui ne peut apporter que du bienfait à la population ». Toutefois, sa réponse est assortie d'une condition non négociable.

Dans l'hiver 1870-1871 une importante crue de la Rougeanne avait emporté le vieux pont de pierre. Une passerelle avait été installée mais ne permettait pas le passage des charrettes. Aussi le Conseil Municipal demande la construction d'un pont par le Génie.

« Aussi bien pour le service de la population que pour celui du camp projeté ». Le 26 juillet 1874, le Conseil Municipal est d'accord pour céder gratuitement 85 hectares sur le plateau de la Bitarelle.

Par ailleurs, 23 propriétaires privés s'engagent à laisser à la disposition de l'armée leurs parcelles pour une superficie totale de 46 ha. Les parcelles sont au nombre de 26, leurs superficies vont de 9 ares pour la plus petite (appartenant à Mme veuve Aveyroux qui se réserve sa récolte de navets) à 27 ha pour la plus grande (appartenant à Mr le Baron de Fournas).

Les premières manœuvres auront lieu à l'automne 1874, elles seront faites sous les ordres du général Barry et regrouperont quelques 6000 hommes.

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Les habitants sont invités à faire preuve de patriotisme en accueillant avec bienveillance les soldats et également les montures.

Les troupes viennent de Montpellier, Perpignan et Albi en plus des garnisons de Castres, Carcassonne, Castelnaudary et Narbonne.

Le terrain a été préparé par le Génie de Montpellier avec la création de nombreux puits.

Le camp principal est situé au nord de la route Moussoulens/Alzonne, mais au mois de septembre 1874 il est prévu de l'étendre au sud sur les propriétés de la Bouriette, Bouilhonac et Galétis où s'installe un Corps d'artillerie de 500 hommes et 500 chevaux (lettre du préfet à Mr le Maire en date du 19 septembre 1874).

La rétribution des propriétaires sera le fumier des chevaux et des hommes (précision avérée). Il semble que par la suite l'artillerie ait surtout été cantonnée à Aragon avec un champ de tir situé entre les Caunettes, Bertrandou et Malportel.

Du 16 au 17 octobre, installation du camp de toile et aménagement du terrain.

Le 18 octobre est un dimanche et, à  cette occasion une grande messe épiscopale est dite devant tous les soldats. L'autel est installé sur un terre-plein au milieu du plateau. Gilbert GUI se souvient d'en avoir vu les restes en accompagnant son père à la chasse.

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Les manœuvres ont lieu du 19 au 31 octobre et lors de la parade finale, une délégation de l'armée britannique est présente.

Si la majorité de l'infanterie est logée ou cantonnée à Moussoulens, Montolieu accueille les cavaliers et Aragon l'artillerie.

Si la majorité des hommes est installé sur le plateau, sous des tentes, des officiers, des hommes et des chevaux sont logés chez l'habitant.

Pour l'année 1874 nous n'avons pas de détail mais pour plusieurs autres camps, dans les années suivantes, nous sommes en possession des listes d'hébergement :

585 hommes et 125 chevaux :

 

  • Jean BAUGUIL : 10 hommes et 3 chevaux
  • Louis COMBES : 50 hommes et 20 chevaux
  • Benjamin ESCANDE : 10 hommes et 2 chevaux
  • Louis GUI : 10 hommes
  • De FOURNAS : 100 hommes et 10 chevaux
  • etc…

 

Des services sont installés dans le village :

Poste de police et Poste de Commandement : à la mairie

  • Infirmerie : chez Eugène ESCANDE
  • Magasin : chez Hippolyte TESCOU
  • Ateliers : chez Jules CROS
  • Lieu de rassemblement : Place du Calcadis.
  • Feuillées (toilettes provisoires) : en dehors du village
  • Eau potable : fontaines publiques
  • Laveries : lavoirs publics et rivière la Rougeanne
  • Abreuvoirs : Places du Calcadis et de l'église et rivière la Rougeanne
  • Pailles de couchage : meules en dehors du village

 

Fournisseurs :

  • Viande : Boucheries FALCOU et RIGAUD à Montolieu
  • Pain : Jean GERMAIN à Moussoulens
  • Epicerie : François OURADOU
  • Légumes : Eugénie SALVETAT
  • Vin : Chez tous les propriétaires et aux cafés.

 

La ration du soldat :

  • Pain de table : 750 gr. – Pain de soupe : 250 gr.
  • Biscuit : 550 gr.
  • Viande fraîche : 300 gr.
  • Sucre : 21 gr.
  • Café : 16 gr.
  • Sel : 16 gr.
  • Légumes secs : 60 gr.
  • Riz : 30 gr.
  • Bois : 1,300 kg.

 

En 1875, seules les troupes de Carcassonne et Castelnaudary utilisent le camp. Par contre, en 1876, les grandes manœuvres sont de retour mais le début est contrarié par un épisode cévenol qui endommage le pont à cause d’une crue de la Rougeanne. Le Génie le reconstruit en « demi dur ». Il sera de nouveau emporté en 1884, en 1887, et 1892 où cette fois, le Génie le reconstruira en dur mais fera payer les matériaux à la Commune.

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De 1874 à 1902, il y aura 13 grandes manœuvres au camp de Moussoulens.

En 1878, 15 000 hommes manœuvrent sur le secteur, ce qui dynamise fortement le commerce local. En 1879, une partie des troupes part en manœuvre au camp du Larzac. La concurrence commence entre les deux camps.

En 1884, le camp trouve une autre utilisation : une épidémie de Typhoïde ayant atteint la caserne de Castelnaudary, le camp est utilisé pour mettre le 15ème RI en quarantaine. Destination qui lui serait également attribuée en cas de Choléra.

En 1887, il y a 30 000 hommes sur la région. C'est l'une des plus grandes manœuvres de l'entre deux guerres, le PC sera installé à la gare de Bram. Par contre, en 1888, les manœuvres d'importance similaire auront pour PC le camp de Moussoulens. Les manœuvres ont lieu avec la participation d'officiers Grecs et un important détachement espagnol. En 1890, des tirs ont lieu aux Caunettes et au Pech Nègre (entre Sesquières et Guitard).

Toutes les personnalités politiques se mobilisent (le maire de Carcassonne Mr DURAND et le député Mr MARTY et Mr SAUZÈDE le futur député) pour obtenir que Moussoulens devienne un camp permanent, camp qui recevrait 12 à 15 000 hommes pendant 7 à 8 mois chaque année. Une petite rente pour les villages des alentours.

1896, Mr SAUZÈDE devenu maire de Carcassonne relance le projet de camp permanent, mais en fait la décision est déjà prise par l'armée en 1891, de créer ce camp permanent et d'importance national sur le plateau du Larzac.

1902, de très grandes manœuvres (les plus grandes au niveau national) vont du 20 août au 16 septembre mobiliser 100 000 hommes sur tout le Lauragais, la plus grande  « bataille » ayant lieu à St Félix de Lauragais. D'autres à Conques, St Papoul et autre, il y aura une période d'intense activité à Moussoulens.

Hélas ce sera en quelque sorte le chant du cygne. Ce sont les dernières grandes manœuvres, mais le camp de Moussoulens sera encore utilisé sporadiquement jusqu'en 1920.

 

Cet article a été réalisé grâce à l'aide précieuse de Gérard CHATEL de Carcassonne.

Bernard FAINE – décembre 2019.

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